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Théâtre National de Bordeaux en Aquitaine – TnBA

Centre dramatique national, théâtre, danse, théâtre en famille


Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine

Il faut tenter de vivre !
Avec Christian Laval, sociologue
Débat public

Les débats publics initiés par l’Université Bordeaux-Montaigne, le TnBA et la Librairie Mollat reviennent au TnBA
sous un titre emprunté au vers de Paul Valéry : « Il faut tenter de vivre ! ».

TnBA - Grande salle Vitez à 19h
Accès gratuit et inscription obligatoire

Renseignements et réservations
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05 56 33 36 80 / billetterie@tnba.org 

Et si le vers de Valéry ne nous avait jamais quittés, s’il nous accompagnait comme une phrase secrète que nous aimons à nous redire, au creux de l’oreille, quand le vent se lève et que s’annonce la tempête ? Car nous voulons vivre libre ou ne pas vivre, et tous les parapets qui bordent notre monde en font un univers trop restreint, familier jusqu’à plus soif, identifié comme une terre fouillée et refouillée et ne sauront avoir raison de cet appétit lumineux qui renverse les tables, défait les sols, se perd dans des labyrinthes éphémères mais s’échappe de toutes les délimitations mélancoliques.

Dans son dernier film, Le vent se lève, le vieux cinéaste japonais, Miyazaki, reprend la vie à son point de départ ou presque : un jeune homme prend un train, quitte son chez-soi, plein de rêves en tête, pour aller faire ses études dans la ville de Tokyo. A la faveur d’une halte et d’un violent coup de semonce qui emporte le parapluie d’une jeune femme, le voilà qui parvient à le récupérer et à lui restituer en disant le vers de Valéry, « Il faut tenter de vivre ». Nous en sommes-là aujourd’hui, ce sont nos noces que celles de ce jeune homme et de cette jeune femme, nous avançons nous aussi à découvert, sans certitudes, sans repères, avec ce désir de vivre chevillé au corps, à l’esprit, dans un temps de précarité qui rend plus désirable encore la possibilité d’un monde commun. Nous en sommes là aujourd’hui dans un étrange alliage entre le vent qui se lève et risque d’emporter bien des digues et notre désir farouche de vivre, d’opposer à la secousse continue du présent la joie d’une échappée en solitaire vers d’autres mondes. Il sera toujours temps d’explorer ce désir, de se demander quelle est sa boussole et quelle est la carte du monde en rapport avec sa fragile énergétique.

La mission confiée aux penseurs qui viendront cette année est celle-là : « le vent se lève » mais « il faut tenter de vivre ». Alors, « courons à l’onde en rejaillir vivants » si nous voulons expulser la mélancolie et devenir les contemporains du possible. Nous ne cherchons pas le gel, le recouvrement dans l’intime, la froideur du repli. Nous souhaitons des brasiers et des feux de joie. Il y va d’un désirable à plusieurs, d’une possibilité du commun, de la recherche de nouvelles manières de faire monde. Les penseurs ne sont pas des machines à enregistrer les séismes. Ce sont d’abord des créateurs de communs, des intensificateurs du désirable, des chercheurs de possibles. Ces recherches ne se font pas dans le dos des gens mais avec eux. Il y va de nos habitations, de ce à quoi nous tenons, de la capture d’un morceau de ciel sous une tente ajourée : la modestie d’être ensemble implique une nouvelle leçon de cohabitation, des façons de faire voisinage qui refusent bien des partages.

L’an dernier nous diagnostiquions la crise, cette année nous explorons les utopies concrètes, les arpents de terre qui émergent dans le brouillard. Le monde n’est pas à réinventer, il se réinvente sous nos yeux. Le rôle de la pensée est de nous le rendre pleinement visible.

Guillaume Le Blanc
Philosophe, écrivain, professeur de philosophie Université Bordeaux Montaigne

Christian Laval, sociologue, est professeur de sociologie à l’Université Paris Ouest Nanterre. Il est membre du conseil scientifique d’ATTAC. Il a publié de nombreux ouvrages qui étudient la pensée politique utilitariste de Marx mais son travail majeur consiste dans une histoire critique du néolibéralisme dont il entreprend l’étude systématique en s’intéressant notamment à la fabrication de la nouvelle école du capitalisme. Son dernier livre, écrit avec Pierre Dardot, propose une philosophie du commun.

Il a notamment publié : L’école n’est pas une entreprise : le néolibéralisme à l’assaut de l’enseignement supérieur (La Découverte, 2004), L’homme économique. Essai sur les racines du néolibéralisme (Gallimard, 2007), Communs. Essai sur la révolution au 21ème siècle (La découverte, 2014).

« Comme principe, le commun définit une norme d’inappropriabilité. L’inappropriable n’est pas ce que l’on ne peut s’approprier mais ce que l’on ne doit pas s’approprier parce qu’il doit être réservé pour l’usage commun ».