Deux courts récits écrits à la première personne par Jean-Luc Lagarce, l’auteur le plus joué en France, trouvent dans le corps et la voix de Vincent Dissez leur accord absolu.  

Dans le journal qu’il a tenu sa vie durant, Jean-Luc Lagarce, immense auteur et metteur en scène de théâtre contemporain décédé en 1995, se décrit comme «un mort revenu parmi les vivants». Les deux monologues autobiographiques que réunit ici Sylvain Maurice sont issus des tout derniers Cahiers de l’auteur, alors que la maladie le fragilise déjà. On est en 1993, et le nombre de décès à cause du SIDA atteint son niveau le plus élevé.  Le premier texte, L’Apprentissage, raconte une renaissance, le retour progressif d’un homme à la vie, tandis que le second, Voyage à La Haye, témoigne de manière émouvante et ironique de la dernière tournée, en forme de dernier tour de piste.  Sylvain Maurice rapproche ces deux textes dont la proximité éclaire brillamment le parcours et le style de l’artiste. En boucles elliptiques, faite de reprises, de répétitions, la langue de Lagarce irradie du plaisir gourmand du mot juste, tout en distillant çà et là l’humour ravageur de ceux qui n’ont plus rien à perdre. Sur le fil, subtilement soutenu par les lumières de Rodolphe Martin et la bande-son de Cyrille Lebourgeois, Vincent Dissez donne une résonance toute particulière à ces mots vibrants, restitue leurs nuances, leur musicalité, leur chant léger et réparateur. Comme les pulsations d’un cœur, à 120 battements par minute.